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Atout Papier - Galerie du Génie de la Bastille, Paris

Le papier est une seconde peau. En première ligne ultime, partagée, infinie. Une peau d’univers, sur quoi certains, trop rares, dehors-dedans confondu, travaillent à vif, à chaud, et comme sur eux-mêmes. Lien intime et ténu qui les rattache à leurs profondeurs, qui les dédouble et les porte en voyage aventureux aux confins de leurs apparences. Des mots rares du poète aux griffonnages de l’architecte, des esquisses dessinées de Fellini avant qu’il ne filme jusqu’aux dessins préparatoires des grands maîtres, le papier est le support fragile de toute création… Le papyrus d’Egypte a donné le ton, pour hier et demain. Certains restent à vie fidèles à la source. D’essence plurielle, plus visible que l’air, plus dense que l’eau, et plus durable que le feu, le papier sacre les forces imaginantes. Support de plénitude, il masque l’inévitable ego de son horizon toujours en mouvement, et toujours ouvert. Papier d’œuvres vives se plie, s’étend, se fend, s’incise, se torture, se dilate, s’écrit, s’encre, se confond, se nourrit, se pigmente, s’enveloppe, se voile. S’encielle et s’offre en atout majeur d’art supposé mineur. Le presque rien d’un papier pauvre traverse tous les miroirs de la plus haute création. Il enchante le visible comme une caresse mentale. Etreinte d’art pur dans le tout invisible et prodigieux de l’échange. L’art qui respire, sur le vide papier que sa consistance ne défend pas sert de nourriture crue aux faims essentielles, qui donnent envie de mordre dans les chairs de l’univers, et donnent à chaque être la source de sa propre respiration. Il met en scène ce qui couve sous la scène immense des apparences. Ces artistes qui font leur demeure d’un papier de riche pauvreté, et qui la saisissent à cœur, sont d’abord de l’humanité. Ces récalcitrants passeurs de vive mémoire font remède à la modernité. N’ont pas la hantise de l’accomplissement. Ils vont au bout de leurs possibles, et des possibles de l’œuvre. On voit des effigies d’infime nature, des reflets d’humaine cité, et des écritures d’art et de hasard portent l’énigme d’un univers oublié. Et c’est là, sans doute, dans une dure solitude, qu’ils vivent ce qui réellement les rapproche, l’impossible union du vide et de la plénitude, et la nostalgie du pays des tableaux. Leurs presque riens sont traces du grand tout.


Christian Noorbergen, critique d’Art


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